Le jeu vidéo est un formidable médium pour raconter des histoires en tout genre. Un bon récit flanqué d'un excellent gameplay parvient à impliquer ceux qui l'utilisent encore plus qu'un livre ou un film. Aujourd'hui nous sommes là pour vous parler du nouveau projet de Patrice Désilets, le père de Prince of Persia et Assassin's Creed. Comme nous vous l'avons déjà dit dans cet article, en effet, le game designer franco-canadien a quitté Ubisoft il y a une dizaine d'années pour se consacrer à quelque chose de nouveau.
Après l'échec du projet 1666 Amsterdam suite à la fermeture de certains studios THQ, Patrice ne baisse pas les bras et fonde Panache Jeux Numériques, un petit studio d'une trentaine de personnes avec qui il commence à travailler sur un titre qui ne racontera pas une histoire simple, mais la mère de toutes les histoires. Ancêtres: L'Odyssée Humaine c'est un jeu où l'on s'embarque sur le long chemin de l'évolution de l'humanité. Une idée aussi intéressante que fascinante et, enfin, nous sommes prêts à vérifier si elle est tout aussi amusante à jouer.
Le Défi des Ancêtres : Ferons-Nous Sapiens Mieux Que Nos Ancêtres ?
Notre aventure commence immédiatement après avoir donné un nom à notre progéniture, il y a dix millions d'années, au coeur d'une jungle africaine. Une petite histoire nous introduit dans le monde du jeu : un primate portant un bébé de son espèce sur son dos s'apprête à prendre son petit déjeuner en paix lorsqu'il est capturé et tué par un oiseau. Heureusement le petit parvient à se sauver et à se mettre à sa place (peut-on dire pour un primate ?) Nous devrons rejoindre la cachette ou le campement le plus proche pour nous sauver de redoutables prédateurs.
Cette première étape n'est rien de plus qu'un tutoriel pour apprendre les commandes et la mécanique essentielles par les Ancêtres. Il est à noter que l'utilisation d'un joypad est fortement recommandée pour jouer et compte tenu du fait que j'ai terminé mon jeu avec le pad Xbox 360, dorénavant nous l'utiliserons comme référence.
Les sticks analogiques, comme d'habitude, sont utilisés pour le mouvement et la caméra, tandis qu'en maintenant le bouton A enfoncé, nous pouvons sprinter et, une fois relâchés, sauter. L'aspect intéressant à analyser concerne cependant les autres entrées : le bouton B est dédié aux mécaniques sociales, que nous analyserons plus loin et, enfin, la touche Y qui met en mouvement leastuce.
Intelligence, sens et vigueur (comment survivre dans la préhistoire des Ancêtres)
Appuyer sur ce bouton rappelle vaguement l'oeil de l'aigle du susmentionné Assassin's Creed à la différence que nous ne nous limiterons pas à la vue, mais entrerons également en jeu deux autres sens percevoir les éléments appelés points d'intérêt dans le monde qui nous entoure.
On peut passer d'un sens à l'autre en appuyant sur les touches Y pour la vue, B pour l'ouïe et X pour l'odorat. Dans cette première phase à travers la vue, nous devrons identifier la cachette au loin et la "mémoriser" pour garder le repère de référence sur l'écran et l'atteindre.
Une fois cela fait, l'action change dans le règlement du clan de notre progéniture, initialement composé d'environ six, sept éléments, qui peuvent être contrôlés un par un. Cependant, nous ne pourrons pas continuer avant d'avoir conclu le tutoriel qui nous oblige à atteindre le chiot au refuge et à le récupérer via un mini-jeu simple dans lequel nous devrons le rassurer. Une fois ramenés à la colonie, on nous dit que nous devrons rencontrer les trois besoins fondamentaux manger, boire et dormir ainsi que survivre aux attaques de prédateurs, aux empoisonnements et (pas rare, surtout pour les joueurs novices) aux chutes d'arbres ou de collines.
Toutes ces variables qui composent le Obliger ils sont représentés par trois cercles concentriques positionnés en bas, dans la partie centrale de l'écran. Le cercle qui entoure tout, en rouge, est leespérance de vie. Il diminue avec les coups de couteau, les fractures et l'épuisement. Le cercle du milieu, jaune, est résistance, qui diminue en réalisant des actions intenses et fatigantes et se recharge en satisfaisant les trois besoins primaires. Ensuite il y a leenergia, l'équivalent de l'endurance, qui, comme toujours, est consommée en effectuant des actions et rechargée en restant immobile.
Après le tutoriel, il y a peu d'aide et d'informations sporadiques qui nous sont fournies par le jeu. Nous sommes essentiellement laissés libres d'expérimenter et de comprendre comment évoluer au mieux dans un monde immense et menaçant.
Réseau neuronal et mutations génétiques : un arbre de compétences atypique (ou plutôt évolué)
Toute action que nous entreprenons pour la première fois, qu'il s'agisse de cueillir un fruit, de l'analyser et de le manger, de fuir un animal sauvage ou d'atteindre un lieu, se transformera presque toujours en un conquête évolutive e il va stimuler le développement du réseau neuronal de nos alter-ego primitifs. Son développement est apparemment similaire à celui de l'arbre de compétences de n'importe quel RPG mais en réalité il est légèrement différent. Les expériences, répétées dans le temps, feront l'affaire nouveaux neurones matures liés à eux. Lorsque cela se produit, nous pouvons nous rendre au lit de notre colonie et accéder au réseau neuronal pour les connecter. Pour ce faire, il est nécessaire d'exploiter lesénergie neuronale accumulé en survivant. Mais attention : celle-ci n'est collectée que si nous emmenons des petits avec nous (ou s'ils sont présents dans notre groupe).
L'importance des chiots est encore plus évidente dans le fait que tous les gènes ne se manifestent pas dans la génération actuelle. Certains, toujours stimulés par certains comportements, se manifestent dans le suivant comme mutations spontanées. Par exemple, si notre primate, encore herbivore, mange de la viande, il ne pourra pas l'assimiler. Cependant, à la génération suivante, une mutation génétique pourrait se manifester qui, si elle se développe et se connecte au réseau, garantira l'évolution de son métabolisme.
Cela ne s'arrête pas là : les connexions au réseau neuronal sont précaires et ne survivent à la prochaine génération que si elles sont renforcées. Ici alors il faut passer au menu dédié e booster les neurones qui nous intéressent. En général, on peut renforcer autant de neurones qu'il y a de bébés.
Le clan, les mouvements, les colonies et les tourments émotionnels (c'est un jeu sur l'évolution pas la poésie)
La procréation et la transmission aux générations suivantes est une mécanique fondamentale pour progresser dans l'évolution. C'est précisément pour cela que nous devons être habiles à gestion des membres du clan, les lier ensemble par des parades nuptiales (toilettage) et les faire se reproduire en évitant au maximum la mort des membres pour nous garantir une progéniture plus nombreuse. Nous pouvons gérer les différentes relations en nous déplaçant d'un membre à l'autre et subvenir individuellement aux besoins de chacun. La mise en relation est importante car avec l'évolution du réseau neuronal dans le domaine de la communication, il va s'améliorer et nous pourrons effectuer des actions de groupe de plus en plus complexes.
Un autre déterminant de l'évolution est le voyage dans le monde du jeu. La réalisation de un nouveau lieu marqué comme un point d'intérêt est en fait une réalisation évolutive. Le choix nous appartient de déménager ou non avec les membres du clan, une décision qui aura ses avantages et ses inconvénients : si d'une part affronter les bêtes sauvages sera plus facile, puisqu'il sera plus facile de les effrayer en un groupe, d'autre part cela signifiera aussi, au moins au début, la mort presque certaine d'une partie d'entre eux.
En déménageant dans un endroit différent, nous pouvons également fonder une nouvelle colonie. J'ai particulièrement apprécié le fait qu'il est pratiquement possible de le faire n'importe où sur la carte. Évidemment, c'est à nous de choisir une zone où il est plus facile de trouver de la nourriture et de l'eau. En parlant du monde du jeu, celui-ci est immense et présente un biome très diversifié: il part d'une forêt verte puis passe à la savane. En continuant plus loin, il y a un désert aride qui mène tout droit jusqu'aux côtes.
À l'intérieur et à l'extérieur des colonies, nous devons également prendre en compte l'état émotionnel des membres de notre clan, représenté par l'icône en bas à gauche. La présence d'un prédateur et son attaque éventuelle provoque l'abaissement de la niveaux de dopamine. Si ceux-ci atteignent zéro, les primates entrent dans un état d'hystérie et nous perdons le contrôle. Même s'aventurer dans des zones inexplorées à l'âge adulte met notre alter ego dans un état de peur de l'inconnu. Nous devons le surmonter en trouvant autant de points d'intérêt qui nous sont familiers à travers les sens, avant que la dopamine ne soit épuisée. Une fois l'environnement rationalisé, il faut atteindre le globe de lumière pour surmonter la peur.
Lorsque nous avons suffisamment développé le réseau neuronal et réalisé au moins une percée évolutive, il est possible avancer à travers les âges. Cela se fait dans une autre section du menu d'évolution. Si nous avons suffisamment évolué, nous pouvons faire évoluer notre progéniture en un seul nouvelle espèce, plus intelligent et plus vigoureux. Le premier saut évolutif que nous ferons sera celui de Sahelanthropus del Ciad, également connu sous le nom de Toumai puis passant progressivement à des espèces de plus en plus évoluées comme leArdipithecus Ramidus etc…
Évolution signifie aussi répétition
Après avoir résumé les principaux éléments du gameplay, il faut cependant souligner une chose que vous aurez sûrement remarquée à partir de ces lignes : Ancestors est répétitif, sacrément répétitif. Nous nous retrouverons de génération en génération à mener les mêmes actions, notamment celles liées aux dynamiques sociales (socialisation, reproduction, etc...). Cela pourrait être une limitation pour de nombreux joueurs instables. Surtout si l'on considère que les actions de timeskip telles que celles de la conception sont suivies de images toujours identiques que nous ne pourrons pas sauter. D'excellents films en préparation mais vus dix, vingt fois casser considérablement le rythme de jeu.
Il est également vrai que la répétition est compensée par l'atteinte des objectifs. Personnellement, j'ai dû beaucoup travailler pour gagner à marcher en position droite mais quelle satisfaction une fois conquise ! Bref, Ancestors semble avoir tout pris à l'évolution, y compris l'aspect répétitif.
Techniquement bon, mais pas encore complètement développé
Apparemment, le titre est techniquement valable : le moteur graphique est Unreal Engine 4 et le rendu graphique est plus que bon, surtout compte tenu de la taille du monde du jeu qui n'a jamais de charge. Les modèles de primates e leurs animations sont spectaculaires, les gars de Panache Digital Games ont fait un excellent travail de ce point de vue. Tout se passe bien avec un maximum de détails sur les PC moyen-haut de gamme.
Cependant, il doit encore évoluer (et peut le faire sans problème) d'un point de vue bug. Parfois il m'est arrivé de voir des interpénétrations, d'autres fois même des personnages qui se figent m'obligeant à relancer le jeu. Rien qui ne puisse être résolu avec quelques correctifs. Compte tenu également du fait que j'ai joué à la version 1.0. Mon souhait est que pour la sortie console en décembre, un marché tout sauf permissif, ces problèmes sont résolus. Après tout, je veux le rappeler : celui de Patrice Désilets est une petite équipe qui grâce à l'expérience de ses membres a réussi à créer un produit qui plus qu'un indie ça ressemble à un triple A.
La seule chose qu'ils ne perdent pas : la piètre IA des fauves, qui est vraiment trop "mécanique". Ils viennent, attaquent et sont mis en fuite par le clan ou pire Déchiqueté si notre progéniture est suffisamment évoluée. Malheureusement, nous devons mettre le nœud sur cette chose (pas neuronale).
Deux mots sur le secteur audio qui est vraiment riche dans la variété des sons et bruits d'animaux et dans leur fidélité. Même les primates ont une voix différente dans les diverses évolutions. La bande son est bonne même si elle n'est pas mémorable.
Un voyage unique (mais pas pour tout le monde)
Ancestors: The Humankind Odyssey pourrait facilement remonter au genre bac à sable enrichi d'un élément de survie. Cependant, à mon avis, il ne relève d'aucun des types mentionnés ci-dessus. Je préfère le définir un nouveau genre qui parvient à transposer parfaitement notre histoire évolutive en termes ludiques, tant dans l'émerveillement de la découverte que dans la répétitivité des actions. Un simulateur d'évolution humaine. Un voyage intéressant, imparfait et unique en son genre, mais pas pour tout le monde.